Hier, j'ai rencontré une fille de mon école secondaire au centre-ville de Sherbrooke. Personnellement, j'ignorais qui elle était. Une certaine Catherine Brault. Je regarde dans mon vieil album, elle existe. Elle existe. Par contre, elle a beaucoup changé. Plus que moi, ça, c'est certain. Comme j'ai dit dans mon dernier billet, mon extérieur n'a pas vraiment évolué depuis quelques années. Ce qui est étrange, c'est qu'elle ne m'a jamais parlé en 5 ans de secondaire. Pourquoi les gens se parleraient davantage maintenant? Parce que « oh on vient du même coin »? Parce que sa fête est 5 jours avant la mienne? J'étais peut-être fermé à cette époque, mais je le suis encore autant aujourd'hui. Je trouve ridicule de se lier d'amitié avec quelqu'un pour des raisons du genre.

C'est vrai, pourquoi est-ce que les personnes avec qui je travaille vont devenir mes amis? Ce n'est pas parce qu'on travaille ensemble, ce n'est pas parce qu'on déteste le même patron ou même parfois parce qu'on a le même uniforme. Non, c'est simplement qu'ils risquent d'avoir les mêmes valeurs et intérêts que moi. Une fille du secondaire qui ne m'a jamais parlé a peut-être des points communs avec moi, mais je n'aime pas lancer me plonger dans toutes les possibilités au cas où une serait bonne. Je n'aime pas rencontrer de nouvelles personnes, car je sais que je ne m'entendrai pas avec la majorité. Il y a différents niveaux d'amitiés. Je peux simplement connaître quelqu'un de passage, je peux connaître quelques détails d'une personne ou je peux même partager l'histoire de ma vie avec une autre. Toutefois, j'en ai eu assez des relations secondaires il y a deux ans.

J'ai décidé de couper ces relations que je juge trop superficielles, trop mensongères. Je vois des collègues et amis qui ont une liste d'amis trop longue. Sur 200, ils parlent à 10. Si le #53 essaie de lui parler, mon collègue/ami va lui répondre gentiment, mais n'en aura pas nécessairement envie. Parfois, on fait mine de ne pas être devant son ordinateur, parfois on va même jusqu'à les bloquer. Remarquez, on ne supprime pas ces gens-là. On les garde, mais ils sont bloqués. Ça nous fait un admirateur. On ne désire pas lui parler, mais on se sent bien à l'idée que cette personne voudrait nous parler. Bref, ce que j'ai fait, c'est un grand ménage. J'ai décidé de couper là où je devais mentir. Je n'ai aucun avantage à entretenir une amitié à sens unique et ce peu importe de quel côté je suis. J'ai réalisé cela assez jeune. Je devais avoir 8 ans quand ma mère m'avait demandé pourquoi je n'appelais plus mon ami André. Je lui ai simplement dit que j'avais compris que même si André était mon meilleur ami, moi, je ne l'étais pas.

C'est peut-être triste de couper des relations comme ça. Je comprends que plusieurs vivent ainsi et voient le fait d'avoir différents types d'amitiés comme quelque chose de normal. Un peu comme quand vous magasinez, vous essayez de trouver des choses qui vous intéressent vraiment, mais vous allez quand même acheter quelques trucs plus ou moins utiles. Si vous êtes le vendeur, vous allez vers les clients qui ont le plus de potentiel de vente, mais vous essayez de ne pas négliger ceux qui ne vont rien acheter pour ne pas les vexer. Si par contre vous le voyez comme moi, les gens n'achèteraient que les choses qui les intéressent vraiment (même si elles ne sont pas divertissantes/attrayantes) et les vendeuses ne perdraient pas de temps avec les lèches-vitrines. Dans ma vie, j'évite ainsi les fausses excuses, les faux sourires et aussi les faux espoirs. La vie est simple. Je garde ce qui fonctionne et j'oublie le reste. Dit ainsi, on pourrait se dire que c'est magnifique. Ma vie va bien, pas de faussetés, pas de perte de temps. Malgré cela, je ne suis pas plus heureux aujourd'hui que je l'étais il y a deux ans.

Cette stratégie comporte de nombreux risques. Le manque de diversité cause de grands problèmes. On peut le voir un peu partout dans la nature. Si on détruit une espèce, il se peut très bien qu'une autre meure. La plupart des choses dépendent de nombreuses autres. Certaines peuvent s'adapter, mais pas toujours. On le réalise rapidement en agriculture. Une monoculture affaiblit le sol et risque de causer d'importantes maladies dans le produit. Pour cette raison, on est forcé d'alterner les cultures ou parfois de mettre différentes graines dans un champ. Si je ne fais pousser que de la laitue, rien ne chassera les insectes. Je fais pousser de la moutarde dans le champ à côté (je dis ça par exemple, fermiers ne m'écoutez pas) et ça attirera des insectes carnivores, mangeurs d'insectes à laitue. Si je désire avoir uniquement des amitiés que je dis « sincères », que peut-il arriver? D'un côté, si je m'en tiens à 5,6 personnes dans ma vie, il me reste peu de gens avec qui je peux aller faire de simples choses comme prendre un café, voir un film ou, pourquoi pas, jouer aux échecs. C'est comme si je ne pouvais manger que de la salade. De plus, qu'arrive-t-il lorsque je suis dans une autre ville pour un stage? Je passe 4 mois loin de toutes personnes que je connais, je n'ai personne à qui parler. Il se peut aussi qu'un de ces amis meure, cesse de me parler ou ne puisse plus le faire. Ma monoculture s'affaisse. De plus, comme je refuse d'aller voir de nouvelles personnes, par crainte d'être déçu ou simplement par lâcheté (appelez cela comme vous le voulez), je ne peux régénérer ma plantation. Je regarde le premier plant mourir, puis le deuxième, ...

Encore une fois, il s'agit d'ajuster le tir. J'ai l'impression que la plupart des gens qui ont 200 amis sur Facebook sont encore jeunes. J'avais moi-même une centaine de personnes sur MSN auparavant. J'ai tenté de changer cela, peut-être un peu trop durement. Quand on n'espère rien des gens, nous ne sommes pas déçus d'eux. Je ne peux pas non plus tout espérer d'eux. Si les gens devaient se fier sur moi, ils seraient amèrement déçus. Cette Catherine m'a fait réaliser que je ne voulais rien savoir des nouvelles amitiés. Pour l'instant, ça ne m'a pas causé trop de problèmes. Ça m'a même soulagé d'un poids. Par contre, si je regarde dans les prochaines années, il me semble impensable de continuer ainsi tout comme c'est impensable de vivre comme le font ceux qui ont trop d'amis. C'est dans notre nature. L'apprentissage, ce qui est acquis, se fait souvent par essai-erreur à la base. C'est notre côté animal. Mon côté bête. Comme j'ai déjà commencé là-dedans, il ne me reste qu'à suivre les étapes méthodologiques:

1. Essayer.
2. Réessayer.
3. Réessayer.
4. Réessayer.
...
∞. Se dire que notre résultat est suffisamment proche de celui attendu.


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