11 mai 2009

Mon T2

Grand départ dans quelques heures (bon, je m'en vais à 70 km de chez nous en fait). Après 9 entrevues, presque 10, j'y suis enfin; mon deuxième stage en ingénierie. Le hasard fait bien les choses. Après une longue série d'échecs qui aurait pu jeter n'importe qui par terre (plus de 50 CV envoyés, 8 entrevues échouées), je me retrouve finalement avec ce qui me correspond le mieux, ce qui me plaît réellement. On nous dit de ne pas s'attendre à grand-chose, on nous prépare même à aller aux pires endroits, à faire les pires tâches. Les rumeurs courent : «Si tu vas travailler dans les mines, les syndiqués vont certainement te faire le coup de remplir tes bottes avec de la terre» ; «Si tu vas dans l'entreprise X, tu vas te ramasser avec le "chicken shit", on va te donner de la job de paperasse, ça va être la même tâche pendant 4 mois» ; «Écoute... là-bas, les ingénieurs sont très mal vus, tu devrais essayer de passer inaperçu autant que possible».

Finalement, avec quoi vais-je travailler? Avec mes mathématiques, avec des dessins techniques. Création de pièces, analyses de structure, mise en plan, etc. Je reste encore surpris de pouvoir faire quelque chose que j'aime. Le plus surprenant est que je n'aurais jamais cru aimer ça. En fait, le dessin technique est la chose que je craignais le plus avant de commencer mon BAC. Le dessin... J'ai joué de la musique classique avec une clarinette pendant 4 ans pour éviter de faire du dessin! J'ai fait deux heures d'arts plastiques en secondaire un ai j'ai compris tout de suite. On nous demandait de créer un dessin avec perspective. Comme peu de gens savent de quoi il s'agit, on nous donne l'exemple d'un chemin de fer. Il se perd petit à petit à l'horizon. Jouant de toute ma créativité, de mon talent artistique et de ma règle, je décide de tracer un chemin de fer qui se perd petit à petit à l'horizon. Un "D"... bon je le méritais. Quelles options me sont offertes?

On cogne à la porte. Ce sont deux musiciennes. Elles recrutent. Il manque de gens à l'Académie. Voilà ma porte de sortie. Je signe et m'éclipse à vie du dessin, du moins c'est ce que je croyais. J'ai réalisé que je n'avais pas de créativité artistique et encore moins de talent. Toutefois, j'ai bel et bien une règle. Si elle n'est pas appréciée en arts, elle l'est en dessin technique. Je réaliserai à quel point j'aime reproduire et créer virtuellement les choses à ma première session d'université. Si la règle est le pire ennemi d'un portrait et des natures mortes, elle est plus qu'utile dans le dessin technique. Non seulement les pièces sont fabriquées de façon géométrique, mais elles ont aussi des dimensions bien standardisées.

Une peinture peut servir d'orientation, d'inspiration. Léonard de Vinci avait dessiné de nombreux objets sans jamais les créer. Qu'il s'agisse d'ailes, de vis volante, de bicyclette ou de machine à polir les miroirs, il les dessinait avec grande précision. Toutefois, il est impossible de reproduire le fruit de son imagination. On peut s'en approcher, s'en inspirer, rien de plus. Bien sûr, on peut l'admirer et s'en émerveiller, mais du côté pratique, comment fabriquer cela? Comment peut-on demander à un ordinateur de le faire pour nous? Comment valider son modèle grâce aux lois de la physique? C'est impossible. Il n'y a rien de mathématique dans l'art, il n'y a que du génie.

L'ingénierie n'est pas le génie, c'est la réalisation du travail d'un génie. Ce sont les détails techniques, les dessins techniques. Ceux qui servent de manuel et non pas de modèle. Cet été, je m'en vais créer des manuels. Je n'ai pas à me plaindre, j'adore cet aspect. Il permet d'améliorer les choses et de les tester. Par contre, j'ai bien hâte de mettre mon génie en oeuvre et laisser l'ingénierie aux autres. Il me faudra quelques années d'analyse et de travail, mais j'ai l'espoir de m'amuser plus tard et de voir si mon imagination est meilleure qu'en cours d'arts plastiques.


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