12 févr. 2009

Ma première chute

Jeudi soir, je sors tout juste d'un magasin de vélos. Il est 17h45. La mauvaise nouvelle est qu'il n'y a pas d'autobus avant 18h20. 35 minutes à attendre dans un quartier où il n'y a rien à faire si vous n'avez pas de voiture. Je me décide, je vais marcher. Bon, il y a 4.5 km entre cet endroit et chez moi, il pleut et il neige et, de plus, j'ai mis mon manteau d'automne en me fiant à la météo de ce matin, la belle erreur. Je ne veux pas blâmer le transport en commun, avec un peu d'organisation on arrive à bon port. Toutefois, si on s'appuie sur l'espoir, on risque d'être déçu dans une petite ville comme Sherbrooke.

Cette marche me fait du bien. Il y a longtemps que je n'ai pas pu marcher à mon rythme ou sans à avoir à entendre des commentaires négatifs sur la qualité du déneigement, sur la température ou même sur moi. Un peu comme une renaissance, je me sens libre. Cette liberté est facilement expliquée. Voilà plusieurs mois que je vivais avec une personne bien que je savais clairement que je ne voulais plus faire ma vie avec elle. La corde est coupée, on tombe et bien entendu, ça fait mal. Chez moi, la douleur est chose courante. Je ne viens pas d'un milieu où l'on peut se plaindre plus qu'une autre personne le pourrait, mais c'est plutôt moi qui crée ces problèmes.

Lorsque je commence à marcher, je me rends compte qu'il n'y a pas de trottoir. Plusieurs autobus passent par cet endroit, il y a même un cinéma juste à côté de moi, mais malgré tout, on a construit cet endroit en se disant que les gens viendraient en voiture. Qu'à cela ne tienne, je continue ma route. Je croise une autoroute. Heureusement pour moi, ils ont pensé à commencer le trottoir à partir du viaduc, déjà je me sens un peu plus en sécurité. Quelques petites choses étranges surviennent. Au moment exact où je passe devant la base d'un lampadaire, celui-ci s'éteint. Certains me diront que ça arrive fréquemment, je suis d'accord, ça doit m'arriver en moyenne 4 fois par année, mais c'était la première fois où les choses étaient aussi synchronisées. Je me sens un peu seul tout à coup...

Après quelques minutes, j'essaie de réfléchir au fonctionnement de mon corps. Certaines personnes restent froides quand il fait froid. Leurs mains sont glaciales et on dirait qu'elles veulent garder toute la chaleur pour eux. De mon côté, c'est l'inverse. Mon corps devient une véritable fournaise en dessous de zéro. Je me demande pourquoi. Certes, on transpire afin de rafraîchir notre peau quand il fait trop chaud, mais malgré mes cours de biologie et de thermodynamique, je ne comprends pas pourquoi mon corps s'amuse à évacuer sa chaleur ainsi alors que c'est l'inverse chez d'autres personnes. Peut-être ne veut-il simplement pas se battre contre ce froid et qu'il veut se vider complètement de son énergie vitale me dis-je au départ. Mon coeur veut-il cesser de battre simplement parce qu'il est triste de ne plus pouvoir battre pour qui que ce soit? Il y a toujours moi! Je refuse que ma chaleur et mon coeur ne servent qu'à autrui. Malgré tout je me sens refroidir lentement.

C'est alors qu'en marchant je rencontre Mireille Roberge. Pour ceux et celles qui ne la connaissent pas, elle est animatrice au TVA Estrie. Je n'écoute généralement pas les nouvelles, je préfère les suivre sur internet. Bref, en marchant, j'ai vu cette femme, face à la caméra, qui allait présenter son bulletin météo de la journée. Je n'ai jamais eu l'occasion de lui parler, pas plus aujourd'hui puisqu'elle semblait être à l'antenne d'une seconde à l'autre. Toutefois, nous nous sommes souri. Elle m'a tout de suite donné cette impression de sincérité. Je la "connais" depuis presque 4 ans, depuis que j'ai déménagé à Sherbrooke. J'ai eu l'occasion de l'admirer à l'été 2007 alors qu'elle s'était donné comme défi de traverser le Canada, seule à vélo (cliquez sur l'image pour plus de détails). Je suis fan de vélo, vous le découvrirez certainement au cours de mes billets. La voir m'a donné un peu de chaleur pour continuer ma route.

À environ 200m de chez moi, je me retourne et aperçois finalement l'autobus qui arrive. Qu'à cela ne tienne, je n'ai peut-être pas de gants ou de tuque, mais cette marche m'a permis de réfléchir et m'a motivé à continuer. Je réalise que ma vie est une très longue marche. Hier, je marchais aux côtés d'une personne, mais je n'arrivais pas à être heureux. Aujourd'hui je suis seul. Suis-je plus heureux? Je ne sais pas encore, mais je n'ai pas l'impression de me mentir. C'est parfois étrange de sentir la sincérité des gens alors qu'on ne croit plus à la nôtre.


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